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LHEB Rencontre : François Reynaud, un enseignant-chercheur qui a la tête dans les étoiles

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La tête dans les étoiles mais surtout dans le Limousin. Son Limousin.

Quand on évoque notre région, le visage de François Reynaud s’illumine. Il l’avoue : il est littéralement sous le charme des vertes prairies limousines, « un endroit où l’on peut faire pleins de choses » selon ses mots.

Et ça tombe bien car l’Homme en Bleu est parti à la rencontre de cet enseignant-chercheur à l’université de Limoges, qui depuis plusieurs années, réfléchit, cherche et trouve dans la lumière des étoiles.


Bonjour François Reynaud ?

Bonjour l’Homme en Bleu !!

Tout d’abord, qui êtes-vous François Reynaud ?

Je suis un Limougeaud pur jus et fier de l’être (ndlr : l’Homme en Bleu approuve totalement le début de cet interview). J’ai fais le choix de rester ici. Après ma scolarité jusqu’en prépa à Limoges, je suis parti à Paris pendant 4 ans pour faire l’école normale supérieure de Saint-Cloud.

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Coucou François !

Mais j’ai toujours considéré que quand on avait suivi son cursus dans un endroit et que l’on y était attaché, il ne fallait pas jouer au mercenaire comme c’est la grande tendance actuellement. J’aime ma région et je voulais y revenir pour l’aider à se développer et faire des choses pour elle.

C’est quelque chose de naturel pour moi, je trouve. Donc après mon service militaire, je suis revenu faire une thèse à Limoges pendant un an et demi et derrière j’ai pris un poste d’enseignant pendant 15 ans à l’IUT avant d’arriver à la fac des sciences.

Le Limousin et vous c’est une belle histoire d’amour alors ?

Ah oui car je suis profondément Limousin. Je trouve que l’on a de la chance d’avoir une belle région et surtout on passe toujours pour des bouseux alors qu’en fait, c’est un lieu très créatif.

Dernièrement, une amie est venue et a été émerveillée par le nombre de petits artisans présents.

Pourquoi le Limousin est créatif ?

On ne se trouve pas en Limousin par hasard. Soit on naît ici, soit on vient s’y installer. Mon amie a trouvé une certaine puissance dans nos paysages, une certaine intensité et c’est vrai que j’ai toujours ressenti ça.

Hyperespace, destination #LIMOUMOU !

Quand on est en Limousin, on se sent ancré. On a l’impression que l’on est soudé à cette terre. C’est un endroit où l’on peut faire pleins de choses.

C’est le Limousin qui a vous donné envie de faire de la recherche ?

En partie. Mais aussi un prof de biologie à l’école, mon père et tous les gens que j’ai pu rencontrer au fil de ma vie qui m’ont permis d’en arriver là.

Aujourd’hui, François Reynaud, il fait quoi ?

Je travaille au sein du labo XLim, dans la subdivision photonique et j’anime la partie qui fait de l’imagerie pour l’astronomie. Nous sommes une équipe de cinq-six personnes qui depuis plusieurs années travaille sur le projet ALOHA.

François Reynaud et pleins d’objets que le commun des mortels ne peut comprendre

C’est notre projet en cours depuis plus de 20 ans. Ce que l’on essaie d’apporter pourrait révolutionner le domaine spatial. En fait, on a développé une nouvelle méthode d’imagerie permettant de voir des objets célestes émettant dans le domaine de l’infrarouge.

On change la couleur des étoiles pour arriver à utiliser la lumière qu’elle émet, plus facilement.

Et maintenant ?

On passe à la vitesse supérieure car on essaie désormais de changer la couleur de sources lumineuses qui sont froides, qui émettent des couleurs qui sont infrarouges. On est partis s’installer sur des télescopes en live comme à l’observatoire de Mauna Kéa (Hawaï) ou du Mont Wilson (Californie) pour des phases de tests et on y revient dans quelques mois.

L’Observatoire du Mauna Kéa à Hawaï

L’Observatoire du Mont Wilson (Californie)

Mais l’idée est de trouver quoi ?

L’idée ultime est d’arriver à observer des objets froids comme des étoiles en cours de formation, des étoiles qui sont mortes ou en fin de vie et des exo-planètes.

On cherche à en extraire la lumière pour avoir des signatures moléculaires pour analyser les constituants chimiques et biochimiques qui composent cet objet céleste.

Ça va changer l’univers ?

Non mais on pourra pourquoi pas utiliser nos recherches dans le domaine médical. Par exemple, une tumeur, c’est plus chaud que le reste des cellules et on pourrait, pourquoi pas, détecter plus tôt une tumeur.

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L’équipe de François Reynaud a mis plus d’un an à trouver ces formules

Il y a pleins de pistes envisageables que l’on n’a pas encore exploitées.

En parlant d’univers, Thomas Pesquet, c’est un bon ambassadeur pour l’astronomie et la science en général ?

Ce gars est excellent. C’est le gendre parfait car il a tout et il ne se prend pas la tête. Je trouve que c’est un très bon vecteur pour montrer que la science, c’est passionnant.

Il y a des gens comme ça qui sont simples et qui font énormément de bien au domaine intellectuel. Il rayonne. Il a quelque chose en plus.

Et Stephen Hawking ?

Il a été chercher au-delà de nos limites. Il a poussé le domaine scientifique. Après, toutes ses théories sont belles mais il faut rester humble sur la portée qu’elles peuvent avoir.

La théorie du Big Bang est avant tout une révolution intellectuelle. Tout comme l’arrivée des exo-planètes. Ce genre de découverte nous ramène un peu sur Terre.

Y a-t-il une chose qui vous a marqué dans votre carrière ?

J’en ai plusieurs. J’ai le souvenir d’une discussion avec Laurent Delage (l’un des membres de l’équipe de François Reynaud) où tout d’un coup notre discussion s’est cristallisée et tout s’est formé en place devant nous. Quand on dit qu’un chercheur trouve, c’est difficile à comprendre mais il y a des moments où tout devient limpide. C’était un vrai bonheur aussi bon que celui de manger un carré de chocolat.

Puis en 2015, on est arrivés au Mont Wilson avec nos valises et notre matériel. Puis 3-4 jours plus tard, on a eu un temps d’observation et en 30 minutes, on a eu les résultats que l’on voulait. On était sur le terrain et d’un coup tout a fonctionné. C’était beau.

Enfin, il y a eu aussi le moment où j’ai pu voir la vrai lumière d’une étoile. C’était à l’observatoire de Haute-Provence où j’ai pu regarder à travers le télescope d’1m60 de diamètre. C’était très marquant.

L’Observatoire de Haute-Provence

« Le langage scientifique n’oublie pas non plus le langage poétique » disait Hubert Reeves (célèbre astrophysicien). C’est vrai ?

Oui car il faut avoir la capacité de s’émerveiller dans la vie.

Enfin on termine avec des petites questions moins scientifiques :

Plutôt Limousin ou Néo-Aquitain ?

On ne peut pas lutter contre le fait qu’il y ait des grandes régions. Après, est-ce que l’on a une culture commune avec tous les gens de la Nouvelle-Aquitaine ? Je pense que l’on est un peu différents. Aujourd’hui, je me sens profondément Limousin mais pas tellement Nouvel-Aquitain.

Ce qui est bien en Limousin ?

La créativité, l’humilité et la proximité avec la nature qui donne une qualité de vie incomparable.

Ce qui n’est pas bien ?

L’inertie de l’époque. La question du train est fabuleuse car elle illustre le fait de tirer dans les deux sens pour arriver à rien. On le paie cher aujourd’hui.

L’hypeloop, on peut y croire ?

Je suis un peu sceptique. C’est un projet qui me parait ambitieux mais qui ne semble pas étayé. Je me trompe peut-être et j’espère qu’une chose, c’est avoir tort.

Merci François


Si vous voulez en savoir plus sur François, il y a aussi ce reportage de 7A Limoges (2014) à mater ICI

Kévin
Cet auteur.trice n’est plus dans la rédaction !

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