Parce que l’engagement c’est important, L’Homme en Bleu te propose aujourd’hui de découvrir une partie des coulisses de la Croix-Rouge, en la personne d’Antoine Hervé, responsable des maraudes à l’unité de Limoges.
LHEB : Peux-tu te présenter, nous expliquer un peu ton parcours ?
A.H : Je m’appelle Antoine Hervé, je suis ingénieur hydraulique pour EDF au niveau des barrages. Ça fait dix ans que je travaille pour EDF, et cinq ans que je suis dans la région. Je travaille à Ester, à Limoges, et c’est un boulot qui me passionne.
Je ne suis pas natif de Limoges, je suis Bordelais d’origine et j’ai l’habitude en fait avec EDF de travailler dans différentes régions. Le Limousin, c’est une région qui me plaît bien et on pense s’y installer avec ma femme, puisque je suis marié depuis deux ans, je suis père de famille, d’un enfant qui s’appelle Marin, qui a bientôt deux ans aussi. Dans le bénévolat je suis engagé depuis très longtemps chez les Scouts et Guides de France en tant qu’animateur-éducateur de jeunes, formateur BAFA et aussi sur des projets de protection et défense des incendies de forêt.
LHEB : Tu es responsable des maraudes à la Croix-Rouge, c’est assez récent, il me semble...
A.H. : Tout à fait, ça va faire depuis un mois et demi, je pense, peut-être deux mois. Suite à la crise COVID, avec ma femme on a décidé de devenir bénévoles à la Croix-Rouge, moi sur l’accueil de jour et les maraudes, et ma femme à la vestiboutique. Progressivement, on m’a proposé d’être responsable des maraudes, donc du coup ça doit faire six à huit semaines que je suis responsable.
On a toujours un peu une idée de ce qu’on vient chercher mais on n’a pas du tout idée de ce qu’on va trouver.
Antoine Hervé
LHEB : Qu’est-ce qui t’a donné envie de t’engager spécifiquement à la Croix-Rouge ?
A.H. : Ça a été la crise sanitaire. Je me suis dit que cette crise sanitaire, c’était compliqué pour tout le monde, notamment les personnes les plus précaires, puisqu’en période de confinement, pour les personnes qui n’ont pas de logement, ça devait être complexe. Du coup j’ai voulu m’engager auprès d’une association.
La Croix-Rouge a été très réactive pour répondre à mes appels. En tout cas, moi j’ai répondu assez rapidement à leur appel, je pense qu’on s’est facilement retrouvés. Après derrière, j’ai vu qu’il y avait une très forte demande, et c’est quelque chose qui me plaît, donc du coup je continue mon engagement.
LHEB : J’ai remarqué que beaucoup de gens ne savent pas forcément ce qu’est une maraude. Peux-tu nous en donner une brève définition ?
A.H. : En quelques lignes, la maraude c’est aller à la rencontre des personnes qui vivent dans la rue, différents publics qui habitent la rue. L’idée c’est d’aller à leur rencontre, et de leur porter assistance. Il y a plein de manières différentes, l’une des manières c’est la distribution alimentaire. C’est ce qu’on fait. Leur apporter aussi un petit café, un petit thé etc, mais c’est surtout discuter avec eux, voir s’ils ont besoin d’aide pour du logement, pour du médical, pour n’importe quoi. Discuter avec eux, assurer un suivi et aussi recenser, pour remonter toutes ces personnes au niveau de la Préfecture, puisqu’on travaille en lien avec la Préfecture. Pour que qu’elles ne soient pas invisibles, en fait. C’est pour que la Préfecture soit au courant de ce qu’il se passe dans la rue.
Une maraude, on sait à quelle heure elle commence, on sait jamais à quelle heure ça finit. C’est toujours un peu l’aventure.
Antoine Hervé
LHEB : En général, quel(s) genre(s) de public(s) est-ce que l’on rencontre en maraude ?
A.H. : Dans les publics qu’on va rencontrer on a des pauvres, c’est-à-dire des personnes qui ont un logement ou qui vivent dans leur voiture, qui travaillent, qui ont un salaire mais pas suffisant. On a des personnes qui sont très isolées, des sans domicile fixe donc sans travail, sans logement, sans rien. On va avoir des personnes qui sont dépendantes à l’alcool, à la drogue, à d’autres substances.
On va avoir des migrants, et des prostitué.e.s. Y a plein de publics différents, à chaque fois c’est des approches, des contacts et des discussions qui sont différents, et chaque fois aussi très riches.
LHEB : Peux-tu nous expliquer comment se déroule une maraude, comment ça se prépare ?
A.H. : A la Croix-Rouge, on a une organisation avec une maraude qui est véhiculée. C’est-à-dire qu’on a un minibus, dans lequel, en fait, on va charger énormément d’affaires, notamment de la distribution alimentaire, et tout ce qui est nécessaire pour faire soupes, cafés, thés, chocolats. On a aussi des kits d’hygiène à distribuer. Du coup, on va partir en voiture faire le tour de la ville. On a un circuit habituel, on va faire ce tour de la ville, s’arrêter sur un lieu, se poser, rencontrer des personnes, discuter avec elles. Derrière, on est en lien avec le 115, donc le Samu Social, qui peut nous demander d’aller intervenir dans telle ou telle partie de la ville pour porter assistance à une personne en particulier. On commence les maraudes à 18h.
Pendant une heure et demi/deux heures, on va préparer la nourriture, on va aller ramasser de la nourriture chez différents partenaires comme La Mie Câline, les Biocoop, et après on va préparer la nourriture avant de partir. Une maraude, on sait à quelle heure elle commence, on sait jamais à quelle heure ça finit. C’est toujours un peu l’aventure parce qu’à chaque fois on peut être confrontés à des situations à la fois très joyeuses, puisqu’on peut avoir des échanges très riches, mais aussi parfois un peu dramatiques, où on va avoir des personnes qui vivent dans une misère assez grande.
LHEB : Actuellement, combien y a-t-il de maraudeurs, grosso modo ?
A.H. : Actuellement, à la Croix-Rouge, on a une quarantaine/cinquantaine de maraudeurs qui sont inscrits sur les listes. Alors après derrière on a des personnes qui sont plus ou moins actives, on a des personnes qui viennent deux fois par an et on a des personnes qui viennent une fois par semaine. C’est un énorme pool de gens très très divers avec des profils très très variés et on fonctionne un peu comme une grande famille. C’est ça qui est assez plaisant.
Discuter avec eux, assurer un suivi et aussi recenser […] Pour que qu'[ils] ne soient pas invisibles, en fait.
Antoine Hervé
LHEB : J’imagine qu’il y a de toutes les tranches d’âges…
A.H. : On a de toutes les tranches d’âges, on a pas mal de jeunes, c’est ça qui est assez plaisant à voir. On a une jeunesse qui s’engage dans le volontariat, notamment sur ces missions-là. Après derrière, on a aussi des anciens. L’avantage de la Croix-Rouge, c’est vraiment d’être une asso inter-générationnelle. Du coup, les maraudes se font en équipe de quatre personnes, et généralement on a toujours des échanges entre les générations.
LHEB : Selon toi, y a-t-il des qualités ou éventuellement des savoir-être « pré-requis » pour être maraudeur ?
A.H. : Oui, il faut avoir de la retenue puisque la Croix-Rouge fonctionne selon des principes forts de neutralité, notamment vis-à-vis des bénéficiaires, des personnes précaires. Il faut être également un peu… j’aurais du mal à trouver un mot assez juste mais… il faut être un peu tanké, un peu fort dans sa tête, parce qu’on peut être confrontés à des situations assez préoccupantes. Je ne sais pas si c’est une compétence ou une qualité mais…
Après, dans les compétences et les savoir-être, c’est le travail en équipe, savoir communiquer. On est en équipe de quatre, on fonctionne vraiment dans des dynamiques d’équipe assez fortes, donc du coup savoir communiquer, savoir travailler avec les autres. Après, la jovialité est toujours un plus, toujours agréable.
L’avantage de la Croix-Rouge, c’est vraiment d’être une asso inter-générationnelle.
Antoine Hervé
LHEB : Comment ça se passe si on en envie de rejoindre les maraudes ?
A.H. : On a plusieurs moyens, le plus simple ça va être de contacter la Croix-Rouge, l’unité locale, qu’on peut trouver très facilement sur Google, sur l’annuaire ou quoi que ce soit. On a un numéro de téléphone, vous appelez, vous dites que vous êtes motivés, et après derrière, on va vous faire un fichier adhérent, puisque pour les maraudes on demande d’adhérer à la Croix-Rouge, c’est une question d’assurance. Ou vous pouvez me contacter directement.
LHEB : Pour conclure, un dernier petit mot ?
A.H. : Faire un bénévolat dans une association qui fait du social, c’est quelque chose qui est très enrichissant, très fort, moi je le conseille à tout le monde, parce qu’on a toujours un peu une idée de ce qu’on vient chercher mais on n’a pas du tout idée de ce qu’on va trouver.
Merci Antoine !
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