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« Un certain regard » sur le Limoumou #7 : Cristina

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L’Homme en Bleu se contente de pas grand-chose : un vélo, une bonne promenade et une belle découverte. À force de bouger, il ne fait que rencontrer des gens de différentes nationalités, ce qui le ravit. Et cette fois il a bien fait le plein, car Cristina est roumaine de naissance mais néerlandaise de passeport. Spécialiste en cybersécurité à XLIM, elle a raconté à l’Homme en Bleu comment elle s’est retrouvée dans notre Limoumou chéri.


LHEB : Bonjour Cristina, ça fait longtemps que tu habites à Limoges ?

CRISTINA : Je suis arrivée en 2017. Limoges est ma deuxième ville en France, après Rennes entre 2013 et 2017.

Oui, Cristina travaille à XLIM

LHEB : Tu pourrais me parler un peu de ton parcours de vie ?

CRISTINA : D’abord je tiens à préciser que je suis quelqu’un de compliqué (rires). Alors, je suis née en Roumanie, à Iaşi, où j’ai grandi. À l’âge de quinze ans, j’ai déménagé avec ma famille aux Pays-Bas, à Eindhoven, à cause du travail de mon père. En 2008 j’ai obtenu la nationalité néerlandaise. J’ai terminé mon lycée dans une école internationale, puis j’ai étudié les mathématiques appliquées à l’université. J’ai poursuivi mes études à Darmstadt, en Allemagne, entre 2009 et 2013, pour un master en cryptographie – en m’orientant plutôt vers le côté informatique de la partie théorique – et ensuite je suis arrivée en France pour un post doctorat.

LHEB : Tu as souvent changé de pays, donc ! Quelle a été la raison de ton déménagement en France ?

CRISTINA : Mon projet de thèse de l’ANR étant financé par Orange, mon post doctorat s’est déroulé à Rennes, où je me suis occupée de protocoles de sécurité. En 2017, face au choix d’une nouvelle destination j’ai décider de venir à Limoges, une ville que pourtant je ne connaissait quasiment pas. La présence de Cryptis a été déterminante : c’est une équipe formée de spécialistes de haut niveau, une vrai excellence en France. À Limoges, j’ai obtenu mon HDR* et suis actuellement maître de conférence à XLIM où je m’occupe justement de protocoles cryptographiques. C’est également ici que j’ai eu mon permis de conduire ! (rires)

LHEB : Quelles sont les choses qui t’ont particulièrement marquée, à ton arrivée à Limoges ?

CRISTINA : Je dirais le paysage, ce côté « rustique » que j’aime bien. Les vaches, le vert très profond, beaucoup plus que dans les paysages bretons. Sinon, la France est déjà le quatrième pays où j’habite, donc il m’arrive de la comparer à l’Allemagne ou aux Pays-Bas. J’ai été marquée par la mentalité différente. Aux Pays Bas, par exemple, tout est très « pratique » ; en France on peut discuter de choses qui ne sont pas forcement pratiques, il existe un côté plus « humain ». D’ailleurs on parle beaucoup, ici (rires). Par contre il y a plein de formalités et quand quelqu’un te parle, c’est comme s’il y avait toujours une sorte d’introduction avant le vrai sujet. Heureusement, dans mon travail cela se traduit en un esprit d’équipe que je n’avais pas expérimenté par le passé : j’aime justement le côté collaboratif français, le fait de travailler ensemble, avec plusieurs professeurs. Ce n’est pas partout pareil.

LHEB : Tu as eu des difficultés à t’adapter à la vie française ?

CRISTINA : Certainement la langue, car j’ai dû l’apprendre. Mais également quelques expressions dont je ne connaissais pas le sens, genre l’utilisation de « pas mal » qui en fait signifie « bien » ou d’autres petites ou grandes nuances, mais je pense que c’est assez normal. Par exemple en France, si on a besoin de quelque chose, on demande : au début je vivais ça comme une intrusion… Bien sûr, j’ai encore du mal à m’habituer à l’absence de transports en commun, surtout pour celles et ceux qui habitent dans les alentours comme moi, et à cette espèce d’isolement de Limoges, où si je prends l’avion je ne peux aller qu’en Angleterre ! (rires) Mais sinon j’ai aussi appris à apprécier plein d’autres choses : la nourriture, par exemple ! C’est en Bretagne que j’ai découvert le cidre ou le beurre salé. Je ne buvais pas d’alcool avant mon arrivée en France.

L’Allemagne peut être verte comme la Haute-Vienne !

LHEB : Quelles sont les choses qui te manquent le plus de chez toi ?

CRISTINA : Mmm, tout dépend de la définition de « chez soi ». Aujourd’hui, je n’ai pas vraiment l’impression d’appartenir à aucun pays. Chez moi c’est les personnes, comme ma maman qui n’est plus là et qui me manque beaucoup, où certains souvenirs que j’aimerais revivre. Ce n’est pas un lieu physique. Je suis satisfaite de ma vie et d’où je vis actuellement. Mon enfant est né ici, j’ai acheté ma maison ici et je n’ai aucune intention de partir.

Une personne qui regarde les nuages dans le ciel : pour moi, Limoges c’est ça.

LHEB : Une question « bizarre ». Si Cristina avait été élue maire de Limoges, quelle serait sa première décision ?

CRISTINA : Je dirais adhérer au réseau TGV. Améliorer les transports en commun, surtout pour se déplacer autour de Limoges. Avoir un IKEA ! Sinon, les sujets qui me tiennent à cœur sont plus nationaux que locaux. S’intéresser aux autres cultures sans les juger, par exemple. En France on aime bien discuter de tout et donner des opinions à propos de tout, mais parfois il faudrait aussi ne pas donner des réponses faciles et respecter tous les gens, ce qui malheureusement n’est pas toujours le cas.

Cristina, une grande voyageuse

LHEB : Tu aurais par hasard un adjectif pour définir Limoges ? Je te laisse choisir la langue, car tu en parles plusieurs, je crois.

CRISTINA : Oui, j’en parle six (rires). Ma langue maternelle est le roumain, mais maintenant je ne le parle plus aussi bien qu’avant. À la maison (mon mari est norvégien) on parle anglais. Alors j’utiliserai l’anglais. Je dirais « serene », sereine. La tranquillité : voici ce que j’associe à Limoges. Une personne qui regarde les nuages dans le ciel : pour moi, Limoges c’est ça. Au fil des années je me suis aperçue que je n’aime pas les villes trop grandes ni celles trop petites. Limoges est une ville parfaite, dans ce sens.

LHEB : Tu as un endroit favori à Limoges ?

CRISTINA : En ville je dirais les Bords de Vienne ou le Jardin de l’Évêché. Mais ce sont les parcs et les alentours de Limoges que je préfère je crois, genre le Parc des Roches Bleues, à Aixe-sur-Vienne, ou les paysages autour de Saint-Léonard-de-Noblat. Sans oublier de longues promenades près de Verneuil.

Le Parc des Roches Bleues – credit photo : Mairie d’Aixe-sur-Vienne

LHEB : Merci beaucoup, Cristina.

CRISTINA : Merci à toi, l’Homme en Bleu.

Si vous aussi vous aimez la cryptographie, Cristina a écrit le livre parfait pour vous !

*Habilitation à Diriger des Recherches

Fabio
Italien de passeport, Limougeaud de cœur : pas de quoi en faire tout un cinéma. Il aime les jeux de mots pourris, l'IPA et faire semblant de s'intéresser à plein de choses.

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