Il n’y a pas que LHEB qui pratique le cyclisme en Limousin, loin de là ! Demain, 15 avril, est une date un peu particulière car nous fêtons les 80 ans de Raymond “Poupou” Poulidor, Limousin de son état et ancien cycliste professionnel de son métier.
Le Limousin a en effet enfanté un de cyclistes les plus populaires de sa génération, malgré le fait qu’il n’ait jamais remporté la 1ère place du Tour de France.
Revenons en 10 dates sur la carrière de ce champion hors norme !
#1 – 15 avril 1936
Naissance à Masbaraud-Merignat, en Creuse. Il rejoindra ensuite Champnétry (87), avec ses parents, où il passera son adolescence avant de s’y marier en 1961.
#2 – 1960
Sur le tard, il débute sa carrière de coureur professionnel. Il a alors 24 ans quand il quitte son Limousin natal. Les coureurs de son âge sont déjà rompus aux joutes du peloton quand lui revêt seulement ses premiers dossards.
Cette éclosion tardive ne l’empêchera pas de rapidement jouer les premiers rôles dans le peloton (il finira 3ème de son premier TDF en 1962) et de remporter de nombreuses courses à étapes et des classiques (189 victoires, au total).
Sa carrière sera marquée par ses duels acharnés avec deux quintuples vainqueurs du Tour de France : Jacques Anquetil, dans un premier temps, puis, dans les années 70, le belge Eddy Merckx. Au prix de scénarii rocambolesques alliant la malchance à un manque rédhibitoire de malice, il n’en sortira jamais vainqueur – ce qui fera certainement une partie de sa légende.
#3 – 3 septembre 1961
Seulement 1 an après ses débuts dans le monde pro, Raymond Poulidor décroche le titre de Champion de France, à Rouen, sur les terres de …. Jacques Anquetil.
#4 – Tour de France 1962
Contre-la-montre Bourguoin-Lyon : Raymond Poulidor s’élance alors avec 3 minutes d’avance sur Jacques Anquetil, leader au classement général. Au kilomètre 38 de l’étape, le Limousin est rattrapé puis dépassé par son rival normand à une vitesse TGV. Déposé sur place. Littéralement.
« Garez-vous, Raymond, et admirez la Caravelle ! » se fendit alors, non sans amertume, Antonin Magne, son directeur sportif de l’époque. Ces mots entreront dans l’histoire du Tour de France, à ses dépens.
Son sobriquet « Poupou » naîtra également de ce Tour de France.
#5 – Tour de France 1964
Puy de Dôme : si l’on devait dresser l’inventaire des étapes légendaires du TDF, celle du 12 juillet 1964 se glisserait, à n’en pas douter, sur le podium des 102 éditions de la grande boucle.
Au matin de l’étape reliant Brive à Clermont-Ferrand, on retrouve toujours les mêmes protagonistes : Jacques Anquetil, dans le rôle du leader incontesté qui domine le TDF en imposant son assise hégémonique depuis 4 ans, et « Poupou » dans celui de l’éternel outsider qui lorgne la victoire finale sans jamais la toucher du doigt.
A la différence des Tours précédents, le rapport de force entre les 2 rivaux semble peu à peu s’inverser. Anquetil vacille, affiche une certaine fébrilité et paraît désormais détrônable. Poupou, lui, monte en puissance, à mesure des étapes, et entrevoit le doux rêve de rallier Paris en jaune. Il se présente alors sur la ligne de départ cette dernière étape de montagne avec seulement 56 secondes de retard sur le Normand. Tout est jouable.
Dès les premiers lacés de l’ascension, Anquetil affiche la mine des mauvais jours. Il est carbonisé, « occis » comme on dit dans le jargon. « J’ai perdu 10 ans de ma vie dans le Puy-de-Dôme » confiera-t-il quelques années plus tard. La France entière assiste à son agonie et brule d’impatience à l’idée que leur coqueluche porte l’estocade. Le quadruple vainqueur du Tour va tomber et l’infortuné Poulidor va enfin triompher.
Non. Le Limousin ne saisira jamais l’aubaine qui se présenta à lui. Pour des raisons qui échappent encore à la sagacité des amateurs du Tour de France, et alors qu’Anquetil tirait une langue « longue comme ça », Poulidor attendit seulement les derniers hectomètres du Puy-de-Dôme pour porter son attaque. Trop tard. Beaucoup trop tard. Il lui reprit malgré tout 41 secondes – réduisant ainsi son retard à 17 secondes. Insuffisant néanmoins.
Anquetil décrochera sa 5ème victoire sur le Tour de France 3 jours plus tard. Cette année là, ce n’est pas le plus fort qui a gagné, mais le plus rusé. Tant s’en faut.
#6 – 25 janvier 1973
« Poupou » reçoit la distinction de « Chevalier de la Légion d’honneur ».
#7 – 1977
Il met fin à sa carrière cycliste, à 41 ans, longue de 18 années au plus haut niveau et riches en succès (notamment un Tour d’Espagne en 1964, Milan-San-Remo et le Grand-Prix des Nations, entre autres) et en popularité.
Il détient à ce jour encore le record du cycliste le plus âgé (40 ans) à s’être hissé sur le podium du Tour de France
#8 – Eté 1987
Atteint d’un cancer, Jacques Anquetil vit là ses derniers instants. Sur son lit de mort, il prend néanmoins le soin d’appeler son éternel rival, et de lui dire : « Tu vois, Poupou, tu finiras encore derrière moi ».
Anquetil lui dédie son chant du cygne. Comme un symbole.
#9 – 1999
Il reconnaît avoir eu recours à la caféine pendant sa carrière.
#10 – 2 avril 2016
Devant les toilettes « Algeco » de Lire à Limoges, des étoiles plein les yeux et filant à grande vitesse sur les sentiers de son 80ème anniversaire, Raymond Poulidor pose avec un Foulaire Magazine à la main.
S’il ne reconnut pas vivre là l’instant le plus fort de sa vie, nous comprîmes à l’expression de son visage qu’il ne l’échangerait pas contre une victoire sur le Tour de France.
La photo parle d’elle-même.
Crédits photos : BastienM /Creuse citron/ Esby / LHEB
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