Pour ce tout nouvel épisode, L’Homme en Bleu est parti à la rencontre d’Adrian, amoureux des planches à roulettes depuis sa tendre adolescence. Après avoir “ridé” de long en large Greytown, l’homme au bonnet nous a ouvert les portes de son shop ouvert il y a deux ans.
Malgré la quasi-inexistence de complexe pour skater à Limoges (non, ne nous faites pas croire que le coin skatebord de Vienne est viable), la planche à roulettes regagne ses lettres de noblesses dans les rues, avec toujours plus d’adeptes.
Mais LHEB veut en savoir plus.
LHEB : Salut Adrian, ASV ?
Salut, j’ai 30 ans depuis le mois d’août, je suis originaire de Paris et Limougeaud depuis 13 ans . Et j’ai ouvert avec Léa ma compagne, un skateshop à Limoges, rue des Arènes depuis 2015.
LHEB : On peut constater que dans certains coins de Limoges, il y a une communauté de skaters. Pourtant, on a le sentiment qu’il y a peu d’infrastructures pour répondre à la demande…
Niveau infrastructure, ce serait mentir de dire qu’on est fourni ici à Limoges. Par contre avec des amis on a une association qui se nomme le FOOAPS, qui nous a permis de monter une école tout récemment afin de faire apprendre le skateboard dans de bonnes conditions et avec des professeurs diplômés.
C’est important, notamment pour rassurer les parents qui sont parfois un peu inquiet de voir leurs mômes se lancer sur la planche à roulettes !
Sinon, on a essayé de faire un peu de “lobbying” auprès de la Mairie depuis 10 ans afin d’avoir un lieu décent pour faire du skate, mais quel que soit le bord, on nous a toujours fait des promesses pour ne rien avoir au final.
C’est dommage, car le skate commence à se populariser, surtout quand on sait que depuis le 3 août 2016, le skate est officiellement une discipline olympique, donc loin des clichés du “sport confidentiel” d’il y a 20-30 ans en France.
Bon toi ça fait des lustres que tu skates, t’as eu l’occasion d’être un “athlète sponsorisé” ?
Ouais effectivement, je le suis encore même si j’ai moins l’occasion de me déplacer autant qu’avant. Et pour répondre à ta question, être “sponso” ça veut dire que tu es en quelque sorte ambassadeur d’une ou plusieurs marques de skate.
En gros, une marque te demande par exemple de te mettre en situation dans un paysage particulier, tu leur fais des images.
Genre moi j’ai fait une photo pour une marque, on s’était posté sur une place de Limoges avec des bâtiments en pierre autour de nous et ça a beaucoup plu à la marque, et voilà.
Après faut pas confondre être “sponso” et être “pro”. Grosso modo, en terme de partenariat avec les marques, t’es considéré “pro” quand t’as un “pro model”. Genre t’as une planche à ton nom par exemple.
Mais malgré tout j’ai pu faire des voyages payés, des contests aussi… Mais voilà ce sont des bons souvenirs, même si je préfère skater avec les copains sur Limoges.
En fait, le plus important dans le skate d’après toi, c’est le côté communauté n’est-ce pas ?
Complètement, le skate c’est vecteur de bonne ambiance. Si quand tu voyages tu vas dans un endroit où tu connais personne, rends-toi sur une place la planche sous le bras et rejoins ceux qui sont déjà sur place, tu seras bien accueilli.
C’est un peu le même délire que les motards en quelque sorte ?
Ouais on peut voir les choses comme ça. Effectivement on retrouve pas mal de valeurs communes et de micros-communautés qui se rencontrent selon les villes où tu vogues.
Je trouve ça bien cool, dommage que l’on puisse pas calquer cet état d’esprit sur le plan humain de manière générale dans ton quotidien.
Parlons franchement, c’est quoi la différence entre le bon et le mauvais skateur ?
Le mauvais skateur c’est celui qui va rider juste pour la crâne. Et même ceux qui vont adopter tous les “codes” marketing du skate en termes de sapes et de planche, pour à la fin ne jamais vraiment progresser.
Un peu comme ceux qui se prennent pour des photographes parce qu’ils ont du matos alors qu’en fait en vrai… C’est pas terrible ce qu’ils font.
Après tu vois, je sais que je contribue un peu à cette hype car je vends évidemment des marques de skateurs, qui peuvent d’ailleurs être portées même par ceux qui ne pratiquent pas la planche à roulettes. Mais bon c’est un peu dommage de voir certains mômes qui veulent à tout prix rentrer dans le moule “skateur” en s’arrachant à chaque fois les dernières sapes de Trasher juste pour être acceptés.
Le bon skateur finalement, c’est celui qui s’en fout un peu des diktats justement, il fait juste ce qu’il aime, sans se soucier de la vision du reste du monde. Après si le bon skateur aime se saper avec du Trasher, pourquoi pas, mais faut juste le faire pour se sentir bien avec soi-même, pas pour les autres.
Bon sinon j’ai fait un tour sur les internets, et je suis tombé sur ton compte Twitter abandonné… Et le dernier post date de juillet 2013 et nous parle d’un certain “Basil”, tu peux dire aux lecteurs de qui s’agit-il ?
Oh putain ! [Il prend conscience qu’il avait un compte twitter] Basil c’est mon chat. Mais en fait c’est cool que tu aies pu déterrer cette info car avec ma copine on ne se souvenait plus de l’âge du chat. Du coup, il a trois ans, merci Twitter.
Vu que t’as eu 30 ans y’a pas si longtemps que ça, on va se faire une interview “Est-ce que à 30 ans…”, histoire de faire un voyage dans le temps !
Ok on fait ça.
Est-ce qu’à 30 ans on peut faire du skate de la même manière que quand on a 20 piges ?
Ouais carrément. Je pense pas que l’âge influe, même si à la limite on skate mieux à 30 car on est plus constant, on se met moins de races à la bière.
Est-ce qu’à 30 ans c’est plus compliqué de se remettre d’une cuite ?
Hmmm pas vraiment non. Par contre ce que j’ai noté c’est qu’on peut se mettre des plus grosses cuitasses à 30 ans qu’à la vingtaine.
Est-ce qu’à 30 ans on commence à se dire que ça bouge à Limoges et qu’en fait on est pas si mal ?
Non. Par contre à 30 ans on se dit que si personne tente de faire bouger les choses, ça ne sert à rien de se plaindre. Quand on veut quelque chose il faut le faire, c’est pour ça aussi que j’ai ouvert un shop.
A 28 ans, quand j’ai vu l’ancien shop* couler [*ndlr : Woodies], j’étais un peu face à un dilemme. Car d’un côté je voulais pas tenter la création d’un magasin en lien avec ma passion car c’est le moyen parfait de s’encroûter et de ne plus avoir le temps de skater, mais de l’autre côté je me disais que si je ne tente pas l’aventure qui va le faire ?
Donc je me suis lancé et je ne regrette pas aujourd’hui.
Limoges c’est un territoire vierge, y’a tout à faire et ça donne envie d’entreprendre !
Est-ce qu’à 30 ans, on a envie d’acheter un bateau et faire le tour du monde ?
Non, par contre j’aimerais bien avoir la thune pour pouvoir acheter le monde, et ensuite en faire le tour en bateau
Est-ce qu’à 30 ans, on s’dit pas que ce serait bien de se trouver une nenette plus jeune pour sécuriser son avenir ?
T’inquiète L’Homme en Bleu, j’ai déjà anticipé ;)
Est-ce qu’à 30 ans, on traite les skaters place d’Aine de “petits cons” ?
Non pas du tout, et même je pense qu’aujourd’hui le plus petit con sur la place d’Aine, c’est moi.
Est-ce qu’à 30 ans on devient moins idéaliste ?
Au contraire, c’est à 30 ans que tu te rends compte que tout est possible. C’est à cet âge là que le rêve se transforme en fait. C’est à cet âge là en théorie que t’as la possibilité, si t’en as la volonté, de faire aboutir tes rêves car t’as plus d’autonomie et de moyens que quand t’as 14 piges.
Puis à vrai dire, quand t’as 30 ans c’est pas plus toi que les autres qui te changent. C’est marrant comme aujourd’hui on te perçoit quand t’es trentenaire mais que tu skates.
Par exemple, la police est plus polie avec toi, on te demande plus ta carte d’identité au bureau tabac, la banque te fait confiance…C’est pas si mal, mais je trouve que c’est le regard des autres qui te fait sentir que t’as 30 ans, pas mon état d’esprit !
Finalement, est-ce qu’à 30 ans, on se dit pas que la vie est belle ?
Je dirais pas que la vie est belle, mais plutôt elle est ce que t’en fais en fait. Par exemple, tu peux te dire à toi même que ta vie est bien, mais ton voisin pensera que t’as une vie de merde comparé à lui.
C’est con, mais c’est vraiment des questions d’appréciations en fait. Et c’est dommage car certaines personnes se laissent peut être trop influencer par l’image que les autres se font d’eux.
Moi en tout cas ça va.
Ok, merci Adrian
N’hésitez pas à faire un coucou à Adrian directement à son skateshop :
Petit Plateau Skateshop
39, rue des Arènes
Limoges
tel : 05 55 42 82 83
Site : www.petitplateauskateshop.fr/
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